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Le dernier besoin naturel
26 février 2010

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Je me baladais près de mon ancienne école une nuit que le sommeil boycottait sans remord... C'était pas si vieux, l'affaire de quelques années, une petite poignée qui avait fuit comme du sable, c'était tout décombres et chantiers maintenant au souvenir de mon ancienne paroisse... Elles se faisaient face, les éducations avec ou sans Dieu c'était l'affaire de quelques mètres. Maintenant c'est fini, ils l'ont remis à ses ruines, Jésus. C'était une chapelle minuscule derrière des vitraux qui avaient pas digéré le cubisme, la seule forme concrète de chrétienté sur la devanture se situait au portique en une couronne d'épine, tressée de fer comme du fil barbelé. L'intérieur était exiguë et froid comme la morale. On y faisait des répétitions, pour les baptêmes notamment. J'ai été un beau bébé athée, c'est avec le catéchisme que ça c'est gâté, la chemise dans le froc et les verrues aux doigts, je faisais tellement pitié qu'on a du voir mon baptême comme une urgence médicale. Suffisamment pour qu'on me demande si encore j'en voulais pas davantage, une communion, confirmation ?... L'ondoiement t'as pas suffit ? C'est trop plein de formalités pour ne pas sentir l'arnaque. Quelque part il devait bien y avoir un truc moins limité.

La cour d'école fait maintenant face à un grand chantier, gris comme la lune derrière des grilles immenses, je me sens le sélénite de la terre, y a pas âme qui vive, même morte, dans un tel cratère. Les gamins ont toujours joué entre les murs hérissés de pieux, parait même qu'une gamine s'y est empalée une fois, le pal lui est rentrée un peu au-dessus de la chatte, dans son pubis imberbe. La fille du directeur, disait la rumeur. Un châtiment drôlement vache. Y avait un monument aux morts aussi, les morts tombés à la Résistance, je me remet mal le slogan aujourd'hui, ça dit un truc très fort sur la liberté et l'honneur des trépassés. L'honneur se défend bien qu'après la mort, c'est le Code civil qu'entérine ça. Pour les vivants, y a un peu de rab, mais il se monnaye. On diffame pas un mort, c'est trop de plaisir. C'est donc là qu'elle serait morte les pattes écartées, la gamine, plantée sur un haut-lieu de la mémoire nationale, comme pour résister un grand coup une dernière fois. Devant une chapelle pas encore déblayée en plus, elle avait le sens du symbole la petiote. C'est de l'acharnement sourd, de glisser comme ça par hasard sur autant de dégueulasserie. On la remarquerait plus aujourd'hui dans ce quartier éventré qui attend sa nouvelle érection. On la laisserait comme un petit fanion blond et gracile. Le petit mât tranchant de ce grand naufrage, avec son mousse clamsé au pinacle.

Ça ferait de l'effet.

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